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Accueil inconditionnel et temps de pause
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© Xavier Schwebel
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Entrammes, Changé

Entends ma voix - témoignages

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Entends ma voix - témoignages accueil de nuit
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En Mayenne, huit Centres d’accueil d’urgence (CAU), qui hébergent quelques nuits les personnes en errance, sont confiés au Secours Catholique. Les locaux appartiennent aux municipalités ou à une congrégation religieuse et les bénévoles accueillent, soutiennent et accompagnent les personnes pendant leur séjour sur place.

 

Simone et Samuel, accueil de nuit à l’Abbaye du Port du Salut d'Entrammes

 

Pourquoi êtes-vous bénévole pour l’accueil des personnes à la rue ?

Simone : C'est l'humain d'abord. On rencontre des gens qui viennent de tous les horizons. Ce qui m'intéresse c'est l'échange. C'est un peu la prolongation de ma vie professionnelle comme travailleuse sociale. Je faisais partie de l'équipe du Secours Catholique et puis le diacre a proposé au frère Alexandre de monter des équipes de bénévoles. Je ne pouvais pas supporter l'idée que des gens dorment dehors, notamment des jeunes à la suite d'une rupture familiale.

Samuel : Je n'ai pas d'investissement religieux particulier dans mon engagement. Ma fibre sociale me vient de mes parents très investis dans leur paroisse. Ils m'ont passé le message. C'est le côté humaniste et fraternel qui me pousse vers cette activité. Les aléas de la vie font que chacun peut se retrouver de manière brutale à la rue.

 

Quel est l'esprit de l'accueil ici à l’Abbaye d'Entrammes ?

Simone : Ici l'accueil n'est pas aussi formaté que dans d'autres accueils d'urgence. On travaille avec le 115 qui oriente les personnes ici et qui a ses règles de fonctionnement, tout en étant chez les moines dont la règle est l'accueil de celui qui dort dehors. Ce n'est pas nous qui décidons. C'est important de travailler à deux, si possible un homme et une femme. Certains passagers ont du mal avec les femmes.

Samuel : C'est un accueil sans condition. On reste souple. Une fois, un homme était triste de ne pas pouvoir lire parce qu'il n'avait pas de lunettes. Deux minutes plus tard, un des bénévoles est allé dans sa voiture lui donner ses lunettes loupes.

 

Quels problèmes rencontrez-vous ?

Simone : J'habite à Forcé et on travaille en binôme. L'intérêt est d'avoir des accueils qui se suivent. Quand les personnes travaillent, c'est plus compliqué. Il arrive qu'on ne soit pas d'accord sur des choses banales. Certains ont horreur de plier le linge ! Mais on évolue.

Samuel : L'horaire du matin pose souvent problème.

Simone : Le matin n'est pas le moment le plus agréable quand il faut leur dire de partir. Des fois, surtout en hiver, ils nous demandent des vêtements. Il arrive qu'on le fasse discrètement, mais ce n'est pas notre rôle. On a eu aussi des problèmes avec des personnes qui squattaient et avaient des accès de violence. Il y a eu aussi un moment de fermeture du local pour des incivilités, des problèmes d'alcool et de drogue.

 

Qu’est-ce que cet engagement vous apporte ?

Simone : La richesse de ne pas toujours travailler avec les mêmes personnes. Les accueillis ne sont pas tous démunis. Il y a des cas atypiques comme celui que l'on surnomme « l'écrivain ». Je me souviens aussi d'une personne, un intellectuel qui avait perdu sa femme, son travail, ses enfants étaient partis et il est tombé dans la dépression et le chômage.

Samuel : Cela permet de faire évoluer nos propres représentations. Nous n'avons pas forcément les mêmes valeurs. Il y a eu un temps où nous avons accueilli pas mal de migrants, y compris des mineurs. La différence culturelle était très enrichissante. Il faut éviter de rentrer dans l'affectif.

 

Avez-vous des regrets ?

Simone : La discussion n'est pas toujours possible. Il suffit qu'il y ait une autre personne pour que cela bloque la parole. Mais je trouve que depuis la Covid il y a moins de personnes qui passent. C'est difficile aussi avec certains qui reviennent pour qui c'est compliqué de faire des projets. Mais les frères ont besoin d'être aidés pour poursuivre leur mission d’accueil.

Samuel : C'est devenu très rare qu'il y ait plus de deux personnes alors que nous avons quatre lits disponibles. Le gros problème de l'accueil d'Entrammes, c'est l'isolement. Il n'y a pas de transports en commun. Mais on ne se substitue pas aux travailleurs sociaux.

 

L’Escale Saint-Roch dans la commune de Changé 

André, co-responsable de L'Escale Saint-Roch à Changé, lieu d'accueil des familles en errance géré par le Secours Catholique. “Je suis entré à l'Escale pour aider ces personnes qui étaient à la rue. Au début il s'agissait de SDF, puis on est passé aux migrants et aux familles avec des enfants. Tous les sans-papiers ont quitté leur pays pour des raisons souvent douloureuses. Ce qui compte c'est de pouvoir les accueillir dans de bonnes conditions. Lors de la période du Covid, on a obtenu que leur séjour puisse se prolonger et dure deux semaines. Cette mission demande une grande disponibilité. Il y a des familles qui reviennent régulièrement. Une que je connais particulièrement est en Mayenne depuis sept ans et elle n'a toujours pas de papiers. Nous lui avons trouvé une solution d’hébergement plus pérenne et un emploi. Mais elle ne vient pas d'un pays en guerre et risque d'être reconduite à la frontière.”

Denise : “Lorsque j'ai pris ma retraite, je cherchais à me rendre utile et je cherchais quelque chose que je ne connaissais pas.  J'ai commencé par Tremplin, l’accueil de jour du Secours Catholique à Laval, les petits déjeuners offerts aux SDF. Puis quand la maison d'urgence s'est ouverte, étant de Changé, je me suis inscrite comme bénévole pour mieux les aider. Je me souviens d'une famille arrivée avec un enfant, puis deux autres membres sont arrivés peu après. Il a fallu trouver des matelas, les aider à faire des courses. Une autre fois, je suis intervenue à la suite d'un appel sur le numéro d'astreinte pour un enfant malade. Après avoir appelé les urgences, j’ai emmené la famille chez le médecin de garde à Argentré. On communique comme on peut. Certains ont une application de traduction sur leur téléphone. Je suis très touchée à la fin du séjour quand une famille doit repartir dans le circuit de l’hébergement d’urgence. C'est difficile de voir les enfants qui vont se retrouver dans la rue, sous la pluie. En aidant les autres, on apprend d'eux et cela arrive que l'on garde une relation qui devient de l'amitié.

Marie-France : “J'avais envie d'aider les autres tant que je suis en bonne santé. On ne sait pas ce qui peut nous arriver à nous aussi. On voit des gens qui sont sans avenir. On ne sait pas trop comment ils vont s'en sortir. On a envie d'en faire plus. Faut être à leur écoute et on est content quand ils ont le sourire. Ils voient qu'on est là pour les aider. Notre rôle nécessite avant tout des compétences de cœur.

Arzu et Sabir,  jeune couple azerbaïdjanais arrivé avec leur enfant : “On se sent mieux et en sécurité ici. On ne veut pas que notre enfant soit malade. On espère trouver un logement à Nantes avec l'Ofpra. On remercie la municipalité de Changé. Les gens ici nous traitent très bien. On a des amis. Notre enfant joue avec les leurs.

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